samedi 24 septembre 2011

Adapter les horaires de travail aux chronotypes des collaborateurs ?

Toutes les études dont nous disposons aujourd’hui confirment le rôle majeur du sommeil dans les capacités cognitives.

- Mémoire : mémoire immédiate, mémoire de travail
- Concentration : vigilance, qualité, exécution des procédures, habileté, précision
- Raisonnement : prise de décision
- Humeur / stress
- Apprentissage


Pendant notre phase de sommeil profond, nous consolidons les apprentissages de la journée, nous traitons les informations perçues, les souvenirs, en différé. De minuscules lésions cérébrales se réparent, et le bon fonctionnement des neuromédiateurs est restauré. Et si le sommeil est perturbé, le processus cognitif l’est également.

Le sommeil est nécessaire au fonctionnement de la pensée et de l’apprentissage. Le sommeil nocturne, bien sûr. Mais également les séquences diurnes : la sieste constitue un réel bénéfice pour la performance cognitive.  Une étude menée par la NASA  a montré qu’une sieste de 26 minutes améliore la performance des pilotes de plus de 34 %. D’autres chercheurs ont également montré qu’une simple sieste d’une trentaine de minutes permet d’améliorer la qualité cognitive, le rythme de travail et la mémorisation. A l’inverse, le manque de sommeil répété altère les fonctions cognitives, augmente la sécrétion de cortisol (hormone du stress) et diminue les capacités de raisonnement.

Certaines entreprises, aux Etats Unis (Nike par exemple), en Chine mais aussi en France ont bien compris l’intérêt de permettre ces courtes séquences de récupération et ont installé des espaces de repos.

Les scientifiques distinguent les chronotypes, c'est-à-dire des profils circadiens et des spécificités individuelles du rapport au sommeil et à l’activité :

Les chronotypes du matin sont à l’optimum de leur performance en fin de matinée, jusqu’à midi. Ils se réveillent souvent seuls (sans sonnerie) vers ou avant 6h du matin. Ils éprouvent le besoin de dormir aux alentours de 21h.

Les chronotypes du soir quant à eux  sont au top de leur productivité à partir de 18h. Ils ont du mal à aller dormir avant 3h du matin et à se lever avant 10h.

Ces deux types de profils circadiens représentent environ 34 % de la population.

Les 66 % restant oscillent de façon plus neutre entre ces deux chronotypes, en étant « plutôt du matin » ou « plutôt du soir ».

Lorsque l’on sait qu’aux Etats Unis le manque de sommeil coûte 100 milliards de dollars aux entreprises (sans parler du coût humain), on peut se demander quels sont les chiffres pour la France où le déficit de sommeil tend à devenir un problème de santé publique.

Pourrait-on alors imaginer une adaptation des horaires de travail des collaborateurs aux chronotypes ? Il est de nombreuses fonctions pour lesquelles cette souplesse serait possible : services informatiques, administratifs… Certains secteurs de la production industrielle pratiquent déjà des horaires décalés. Mais il s’agit alors de répondre aux impératifs de l’organisation, non pas de prendre en compte les chronotypes des personnels. Il y aurait pourtant un intérêt pour tout le monde (collaborateurs et entreprises) à instaurer de nouvelles mesures dans ce sens chaque fois que c’est possible. Bien sûr, il est peut-être difficilement envisageable d’aller visiter un client B to B entre 18h et minuit. Encore que… Ne pourrait-on envisager des rencontres du troisième… chronotype !

Revue « Pour la Science » n° 315 (« Les clés du sommeil ») et n° 382 (« La sieste est-elle nécessaire ») Delphine Oudiette, doctorante en neurosciences dans l’Unité des Pathologies du sommeil de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.



mardi 13 septembre 2011

Le sport améliore la santé et… les performances de notre cerveau

Malgré l’influence de Descartes, on savait empiriquement de longue date (et Spinoza s’est plu à l’expliquer) que corps et esprit sont indissociables.

Les études épidémiologiques ont montré depuis les années 60 qu’une activité sportive régulière est bénéfique sur la santé mentale et sur la santé globale. L’influence du corps sur l’esprit… et inversement.

Si l’activité physique a largement contribué au développement du cerveau humain au cours de son évolution, l’imagerie médicale permet aujourd'hui d’en prouver les bienfaits majeurs, rapidement capitalisables.

En effet, une pratique sportive régulière et raisonnable (environ 30 à 40 minutes 3 fois par semaine) :

- Régule le stress et diminue l’anxiété
- Renforce la plasticité cérébrale (capacité d’apprentissage)
- Facilite la création de nouveaux neurones (tout au long de la vie !)
- Stimule et améliore les fonctions cognitives
- Agit positivement sur l’humeur
- Augmente les capacités de mémorisation

Autant d’éléments et de qualités aussi utiles pour la collaboration en entreprise que pour le bien Etre Humain en général.
Etre « bien dans ses baskets » n’a jamais eu un sens aussi concret !

Pour en savoir plus :
« Effets de l’exercice physique et de l’entraînement sur la neurochimie cérébrale. Conséquences comportementales ». Charles-Yannick Guezennec (Annales médico-psychologiques, 942, 1, 2008)
« Activité physique, contextes et effets sur la santé ». Expertise collective, Les Editions de l’Inserm, 2008.
« Les dossiers de la recherche » n° 40 (Août 2010).

 Réseau de neurones :




mercredi 7 septembre 2011

Dans un groupe de travail, la présence des femmes et la manière d’interagir font croître l’intelligence collective

C’est ce que démontrent les travaux d’une équipe de psychologues de l’Université de Pittsburgh sous la conduite de la chercheuse Anita Woolley1.

L’étude parue fin 2010 dans la revue Science indique que l’intelligence collective dépend moins des intelligences individuelles que des trois autres facteurs déterminants suivants :


- La sensibilité sociale des membres du groupe
- L’égalité dans la répartition des temps de parole
- La présence de femmes

Les groupes dans lesquels la parole est monopolisée par une ou deux personnes sont globalement moins productifs d’intelligence collective que ceux où la parole est plus largement répartie (et où une pluralité d’idées peut s’exprimer).

Ce qui est entendu ici par « sensibilité sociale », c'est la faculté de percevoir et d’interpréter sur les visages et dans les regards l’humeur, l’état d’esprit, l’approbation ou la réticence des interlocuteurs. Dans de précédentes études menées, les femmes avaient des scores supérieurs de sensibilité sociale. 

L’équipe de Pittsburgh explique que, si bien évidemment l’intelligence individuelle est nécessaire à l’intelligence collective, le mode d’interaction relationnelle dans un groupe est réellement déterminant. 

La conclusion encourageante de l’étude est qu’il pourrait être plus facile d’améliorer (et d’évaluer) l’intelligence et la performance du groupe que celle des individus, simplement en améliorant la manière de communiquer et d’interagir au sein d’un groupe, équipe de travail ou entreprise dans son ensemble.

1Woolley AW, Chabris CF, Pentland A, Hashmi N, Malone TW. “Evidence for a collective intelligence factor in the performance of human groups”. Science 2010 Oct 29 

mardi 6 septembre 2011

C'est en modifiant l'anatomie du cerveau que l'on acquiert une compétence


Il faut juste savoir en préambule que les neurones sont composés d’un noyau et de multiples synapses qui créent des connexions entre elles, permettant ainsi la mémorisation des apprentissages.

Eric Kandel, chercheur et prix nobel de physiologie et de médecine en 2000, a consacré de nombreux travaux à la mémorisation et il décrit la modification de l’anatomie du cerveau de la manière suivante : « la mémoire à court terme engendre une modification de la fonction de la synapse, en renforçant ou en atténuant les connexions préexistantes ; la mémoire à long terme, en revanche, demande des modifications anatomiques. Un entraînement répété par sensibilisation (autrement dit une pratique) conduit les neurones à faire croître de nouvelles terminaisons, fabriquant alors une mémoire à long terme».

Il confirme ainsi (avec bien d’autres neuroscientifiques) un élément d’importance dans les processus d’apprentissage et de changement : 

C’est par l’action et la pratique que l’on apprend durablement et que l’on modifie la plasticité cérébrale.

Eric Kandel, « A la recherche de la mémoire : une nouvelle théorie de l’esprit ».    

vendredi 2 septembre 2011

La compétition qui devient rivalité finit par altérer le jugement


C’est ce que démontre une étude des psychologues de l’Université de Northumbria (Grande Bretagne). Poussée à l’extrême, la compétition qui passe d’émulation motivante à rivalité finit par perturber la mémoire et l’attention, dérouter le raisonnement, et peut conduire à des comportements de tricherie ou des erreurs contre-productives. On s’en doutait, mais là, des travaux nous le font constater avec force explication de l’activité cérébrale et des capacités mnésiques étudiées.

On en demande toujours plus aux managers, mais leur donne-t-on les bons outils ?


Il leur faut atteindre les objectifs, bien sûr. Mais il leur faut également prendre des décisions et des risques parfois, et aussi animer une équipe, être attentif aux individus, aider à leur développement, manager en transversal certains projets, … 

L’idée se dessine d’une performance à étages où à chaque décennie environ, l’édifice managérial doit s’élever et ajouter une « couche de compétences ». 

Donne-t-on pour autant du sens à cela ? Relie-t-on toutes ces exigences à des résultats bénéfiques constatés pour l’entreprise, les collaborateurs et les managers ? Aide-t-on les managers à se développer eux-aussi, à enrichir ou professionnaliser leurs pratiques ? Leur fournit-on les outils appropriés, les accompagnements adaptés, les lieux et occasions d’expression ou d’échange de pratiques ? Pas toujours hélas. 

Par ailleurs, les managers ne sont pas toujours informés de l’existence de tous ces éléments destinés à les aider dans l’atteinte d’une performance humainement durable, d’une conciliation entre objectifs d’entreprise et objectifs individuels.

Pourtant,  2 entreprises sur 3 reconnaissent que la performance managériale joue un rôle essentiel dans la performance globale de l’entreprise. Mais comment et à partir de quoi évalue-t-on cette performance managériale, quand on sait que 1/3 des entreprises de plus de 500 salariés et 2/3 des entreprises de moins de 500 salariés ne fournissent pas de référentiel de compétences managériales ?

Et qui évalue ? Essentiellement le n+1, à 90 %. Craindrait-on, en France, d’interroger le terrain ? C'est-à-dire les collaborateurs, les clients, les collatéraux ? Aurait-on peur, par exemple, des outils de 360° utilisés par 13% d’entreprises seulement ?

La personnalité du manager est considérée comme un facteur déterminant dans la réussite d’un management et d’une animation d’équipe. Mais dans quelle mesure s’intéresse-t-on au profil de personnalité du manager ?

Il existe pourtant un grand nombre d’éléments et d’outils pour permettre d’identifier et d’accompagner des profils qui permettront de privilégier des logiques de coopération et de coordination dans une équipe. Nos confrères anglo-saxons l’ont compris depuis bien longtemps. Ils ont apporté une large contribution au développement de ces outils (360° et profils de personnalité) et à leur utilisation éthique ainsi qu’aux apports bénéfiques des neurosciences au management et aux personnes.

Comment pouvons-nous aider nos entreprises françaises à intégrer ces richesses dans l’accompagnement de la performance managériale ?

Sources des éléments chiffrés : Enquête Hommes & performance, EM Lyon et APEC