vendredi 29 juin 2012

NTIC : Les interruptions incessantes au travail engendrent un coût humain et financier colossal


Une étude Sciforma de Septembre 2010 démontrait qu’il est impossible pour un salarié français de rester concentré sur une tâche plus de 12 minutes sans être interrompu. Une sur-sollicitation de l’attention due à un environnement de travail technologique qui a évolué plus vite que nos bonnes pratiques et plus vite que la conscience des effets délétères de la fragmentation du travail que cette dispersion entraîne.

Interruptions multiples : notre attention est capturée

Arrivées de mail, messagerie instantanée, fils RSS qui s’affichent en pop-up, Smartphones (appels et SMS), téléphone fixe… autant de signaux sonores et/ou visuels qui viennent nous soustraire à l’activité sur laquelle nous espérions naïvement nous concentrer pour avancer dans notre production. L’étude Sciforma indique que 75% des collaborateurs avouent interrompre leur travail pour regarder le contenu d’un nouveau message reçu. 

Les cadres, quant à eux, sont interrompus en moyenne toutes les 7 minutes dans leur travail ! 

Pouvons-nous ignorer les fenêtres « pop-up » qui surgissent sur notre écran ? Il semblerait que non, car nos neurones rendent « saillants » ces stimuli et organisent le déplacement instantané de nos yeux et de notre attention. Celle-ci est sous l’influence de l’environnement, ce que l’on appelle l’effet bottom up. Elle est capturée et prise dans un enchaînement de réactions et de pensées que, pendant un temps, nous ne contrôlons pas. Notre attention est en permanence réorientée par des forces contraires. Ces stimulations intrusives sont précisément là pour nous interrompre et nous amener à nous intéresser à un événement qu’il serait plus important de traiter séance tenante. Et de fait, par automatisme attentionnel, notre cerveau le considère dans un premier temps comme plus important. 

Certes, d’autres zones du cerveau (lobe frontal) permettent de revenir à notre activité, mais c’est pour une courte durée, et au prix  d’un effort d’attention et une volonté marquée. A terme, cette capacité finit par être diminuée.

Concentration et prise de décisions perturbées

Ces sollicitations incessantes ont pour effet une dispersion mentale qui est loin d’être sans conséquences. La fréquence de la déconcentration finit par perturber de façon durable notre faculté de concentration volontaire. Il devient de plus en plus difficile de se centrer sur une seule activité, même lorsque nous en avons la possibilité, tant l’habitude du zapping est intégrée. En effet, notre système attentionnel automatique étant en permanence stimulé par l’environnement sans avoir d’effort à faire, notre cerveau s’habitue à compter sur des signaux externes pour réactiver sa vigilance. Ceci modifie de façon profonde les focalisations cognitives et il devient alors très difficile de concentrer et maintenir son attention volontairement. 

Nos engagements intellectuels deviennent également plus difficiles à prendre. Car ces sollicitations nous obligent sans arrêt à faire des choix de priorités contradictoires, perturbant notre cerveau qui ne sait alors plus quelle stratégie adopter. Cela  finit par déstabiliser et retarder notre capacité à prendre des décisions et à prioriser. Il devient d’ailleurs de plus en plus fréquent d’intervenir en entreprise pour accompagner des collaborateurs sur le thème de l’arbitrage des priorités.

Les effets psychiques, physiologiques et sociaux des interruptions au travail

Les stimuli qui polluent les environnements de travail et forcent notre attention créent un sentiment d’urgence doublé d’une culpabilité : il faut choisir très vite ce que l’on va traiter et le traiter tout aussi vite ! Tout est plus urgent que l’urgence d’il y a 1 minute (25 % des personnes sondées par l’étude Sciforma on déclaré ne travailler que dans l’urgence). Mais on ne peut plus rien traiter en profondeur. Un sentiment de frustration et d’impuissance en vient souvent à se développer qui émousse la perception de sens et d’utilité de sa contribution, voire le souvenir du travail effectué dans la journée. Une surcharge de travail résulte de ces multiples interruptions. Car la liste des tâches s’allonge au fur et à mesure des sollicitations.


Non seulement le bien-être diminue¹, mais l’épuisement cognitif, l’anxiété et le stress s’installent inévitablement, de façon structurelle et toxique tandis que l’énergie mentale diminue. Le cortisol (hormone du stress) sécrété durablement altère les défenses immunitaires, la qualité du sommeil et conséquemment notre faculté à gérer les situations. C’est une spirale pernicieuse et dangereuse.

Le sentiment d’isolement s’accroît à juste titre. On ne quitte plus son poste de travail afin de ne manquer aucune sollicitation, et parce qu’il est plus simple, pour poser une question, d’envoyer un message instantané ou un email au lieu d’aller dans le bureau juste à côté. Les relations interpersonnelles sont moins nombreuses et appauvries en qualité. La communication virtuelle, directe, rapide, pressée et la plupart du temps maladroite et parfois même hostile génère  émotions négatives, agressivité ou même conflits. C’est tout un climat qui est transformé. Le travail en équipe s’en ressent fortement, la cohésion et l’envie collaborative étant largement dégradées.

Ajoutons que selon une enquête en ligne2 réalisée auprès de 625 personnes aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne, en Norvège et à Hongkong, les collaborateurs sont beaucoup moins impliqués et dans une concentration fortement diminuée lors d’une communication électronique.  Ils sont en revanche beaucoup plus attentifs en présentiel. Notons qu’une personne interrogée sur quatre (seulement !) a déclaré terminer réellement la lecture d’un courrier électronique avant de le supprimer. Combien de messages importants sont-ils supprimés ou oubliés ? Mais on peut également se demander combien de messages envoyés et reçus sont réellement importants ?

Un travail fragmenté altère gravement la performance et représente un coût financier colossal

On choisit de répondre à un collègue par email, on prend un appel téléphonique inattendu, on abandonne une tâche pour se consacrer à une autre qui s’impose messagerie instantanée et qui prend bien sûr 2 à 3 fois plus de temps que les 5 minutes que l’on comptait lui accorder, etc. 

Ces perturbations cognitives ont un effet désastreux sur la performance. Car il en résulte une fragmentation du travail qui induit des retards de production et une perte de qualité.

En effet, après l’interruption, il faut reprendre le fil du dossier qui nous occupait (pour quelques minutes seulement puisque la prochaine interruption n’est pas loin). Or le temps de retour à la concentration après interruption a été étudié par l’universitaire californienne Gloria Mark et est en moyenne de 25 minutes ! 

Un rapport récent démontre la perte de performance et le coût financier provoqués par les interruptions de travail.  Elaboré par Basex, spécialiste mondial des interactions entreprises-environnement, il indique que les interruptions, dues aux sollicitations diverses, engendrent une perte de temps de travail des salariés de 28 %, soit plus de 2 heures par jour. Ceci représente un coût de… 588 milliards de dollars sur une année ! Précisons en outre que l'étude a été menée sur la période 2004 à 2005. On peut imaginer que depuis lors, l'augmentation des sollicitations a pu grever ce montant, vu que les prévisions de l'étude évaluaient à 5% par an cette augmentation.
Quant au coût des communications inefficaces parce que non présentielles (emails notamment) il se monte à 297 milliards de dollars2.

Un coût humain énorme et des pertes financières… N’est-il pas temps pour nous de vous reparler du management humaniste que nous préconisons, et qui décline des solutions opérationnelles durables et performantes ?...

¹ Travaux de Christophe André, médecin psychiatre à l’Hôpital Sainte-Anne – Paris
2 Etude RoperASW et TANDBERG

1 commentaire:

  1. Merci pour cet article. Une solution comme Sciforma permet-elle d'avoir un rapport sur la gestion du temps : temps passé par tâche, etc ?

    Merci par avance pour vos réponses

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