Toutes les études dont nous disposons aujourd’hui confirment le rôle majeur du sommeil dans les capacités cognitives.
- Mémoire : mémoire immédiate, mémoire de travail
- Concentration : vigilance, qualité, exécution des procédures, habileté, précision
- Raisonnement : prise de décision
- Humeur / stress
- Apprentissage
Pendant notre phase de sommeil profond, nous consolidons les apprentissages de la journée, nous traitons les informations perçues, les souvenirs, en différé. De minuscules lésions cérébrales se réparent, et le bon fonctionnement des neuromédiateurs est restauré. Et si le sommeil est perturbé, le processus cognitif l’est également.
Le sommeil est nécessaire au fonctionnement de la pensée et de l’apprentissage. Le sommeil nocturne, bien sûr. Mais également les séquences diurnes : la sieste constitue un réel bénéfice pour la performance cognitive. Une étude menée par la NASA a montré qu’une sieste de 26 minutes améliore la performance des pilotes de plus de 34 %. D’autres chercheurs ont également montré qu’une simple sieste d’une trentaine de minutes permet d’améliorer la qualité cognitive, le rythme de travail et la mémorisation. A l’inverse, le manque de sommeil répété altère les fonctions cognitives, augmente la sécrétion de cortisol (hormone du stress) et diminue les capacités de raisonnement.
Certaines entreprises, aux Etats Unis (Nike par exemple), en Chine mais aussi en France ont bien compris l’intérêt de permettre ces courtes séquences de récupération et ont installé des espaces de repos.
Les scientifiques distinguent les chronotypes, c'est-à-dire des profils circadiens et des spécificités individuelles du rapport au sommeil et à l’activité :
Les chronotypes du matin sont à l’optimum de leur performance en fin de matinée, jusqu’à midi. Ils se réveillent souvent seuls (sans sonnerie) vers ou avant 6h du matin. Ils éprouvent le besoin de dormir aux alentours de 21h.
Les chronotypes du soir quant à eux sont au top de leur productivité à partir de 18h. Ils ont du mal à aller dormir avant 3h du matin et à se lever avant 10h.
Ces deux types de profils circadiens représentent environ 34 % de la population.
Les 66 % restant oscillent de façon plus neutre entre ces deux chronotypes, en étant « plutôt du matin » ou « plutôt du soir ».
Lorsque l’on sait qu’aux Etats Unis le manque de sommeil coûte 100 milliards de dollars aux entreprises (sans parler du coût humain), on peut se demander quels sont les chiffres pour la France où le déficit de sommeil tend à devenir un problème de santé publique.
Pourrait-on alors imaginer une adaptation des horaires de travail des collaborateurs aux chronotypes ? Il est de nombreuses fonctions pour lesquelles cette souplesse serait possible : services informatiques, administratifs… Certains secteurs de la production industrielle pratiquent déjà des horaires décalés. Mais il s’agit alors de répondre aux impératifs de l’organisation, non pas de prendre en compte les chronotypes des personnels. Il y aurait pourtant un intérêt pour tout le monde (collaborateurs et entreprises) à instaurer de nouvelles mesures dans ce sens chaque fois que c’est possible. Bien sûr, il est peut-être difficilement envisageable d’aller visiter un client B to B entre 18h et minuit. Encore que… Ne pourrait-on envisager des rencontres du troisième… chronotype !
Revue « Pour la Science » n° 315 (« Les clés du sommeil ») et n° 382 (« La sieste est-elle nécessaire ») Delphine Oudiette, doctorante en neurosciences dans l’Unité des Pathologies du sommeil de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.